Comment rédiger une convention BIM ?

La convention BIM  est un document définissant des processus de gestion et modélisation des données d'une construction, selon les informations requises par la maîtrise d'ouvrage et les usages de la maquette numérique choisis pour atteindre les objectifs BIM des acteurs du projet.

Ce document est un contrat, il explicite le triptyque fondamental du Building Information Management : 

la convention BIM doit être une réponse exhaustive au cahier des charges BIM

Qui rédige la convention BIM ?

L’équipe responsable de la mission BIM Management rédige la convention, en collaboration avec l’ensemble des BIM coordinateurs du projet. Un BIM coordinateur est le référent pour le Building Information Modeling dans une équipe de production responsable d’un modèle constitutif de la maquette fédérée.

Le BIM Manager, responsable de la gestion de projet BIM et membre d’un groupement de maîtrise d’œuvre, rédige une pré-convention lors du processus de consultation et la propose à l’équipe MOE, puis à la MOA.

Nous devons établir ce qui est strictement nécessaire et suffisant à l'application des usages sélectionnés.

Le BIM est une méthode collaborative encore nouvelle. Par conséquent, si le BIM Manager rédige une convention de manière absconse et prolixe ; alors que les architectes, bureaux d’études techniques et économistes de la construction, ont des délais toujours très courts, il y a toutes les chances pour que celui-ci « braque » les équipes de travail. C’est pourquoi, le BIM Manager doit être pragmatique et concis dans sa rédaction. 

Quatre Alexandrins de Nicolas BOILEAU (1636-1711), utiles à se rappeler lors de la rédaction d’un document :

« Ce que l’on conçoit bien s’énonce clairement, 

Et les mots pour le dire arrivent aisément. »       

                                     …                                                                  

« Mon esprit n’admet pour un pompeux barbarisme, 

Ni d’un vers ampoulé l’orgueilleux solécisme. »

Le propos de Nicolas BOILEAU parait peut-être évident, mais nous avons tous tendance à l’oublier…

La qualité d'une convention BIM ne se mesure pas à son nombre de pages !

Chez BIMSY, nous essayons de rédiger un document assez court : 15 à 20 pages environ (hors annexes). Comme exemples d’annexes, nous pensons notamment aux Tableaux des Niveaux de Développement (TND) décrivant les objets de la maquette numérique BIM (requise à des étapes clefs du projet). En effet, au-delà d’une vingtaine de pages, le risque devient relativement grand que ce document soit juste lu « en diagonale ». 

Quelques recommandations d'ordre juridique pour la rédaction de ce contrat :

Ce document contractualise les règles de gestion et production des données.

En conception, la convention BIM définit les conditions dans lesquelles la maquette pourra être utilisée lors de la phase d’exécution. Par exemple, les entreprises pourront utiliser la maquette de conception : soit en tant que base de données de référence, soit comme point de départ pour continuer vers le BIM d’exécution.

Afin de ne pas alourdir inutilement une convention, il est préférable d’éviter d’y répéter des informations qui sont d’office présentes dans d’autres documents plus élevés dans la hiérarchie contractuelle du projet. 

La convention BIM liste tous les acteurs collaborant autour de la maquette BIM.

Cette liste donnera les noms, fonctions et périmètre de compétence pour chaque équipe intervenante : Architecture, Structure, CVC, Plomberie… Nous renseignerons également l’identité et les coordonnées du référent BIM de chaque équipe ; il en va évidemment de même pour le BIM Manager.

lister les logiciels BIM et leur version que chaque équipe utilise, définir leS formatS d'échange pour le projet.

De plus, la convention encadre les conditions de mise à jour des softwares. En effet, un upgrade de logiciel, fait sans concertation, peut engendrer des difficultés pour un cas d’usage.  

établir une matrice de responsabilité de haut niveau en fonction du rôle de chacun.

Nous vous conseillons d’utiliser une matrice RACI, un outil de gestion de projet qui définit quatre niveaux d’implication :

ATTENTION ! Il est important d’avoir un seul « Accountable » par tâche.

Exemple de matrice RACI pour la convention de Building Information Modeling/Management dans un projet de construction :

Convention BIM Matrice RACI

Décrire les usages BIM nécessaires pour atteindre chaque objectif.

Qu'est-ce qu'un usage BIM ?

Un usage BIM est une façon (méthode) d'utiliser la maquette numérique en vue de remplir, un ou plusieurs objectifs, au cours du cycle de vie d'un ouvrage.

Il est nécessaire de distinguer deux types d'usages BIM :

NB : Nous n’avons pas à contractualiser avec la MOA, les usages que le groupement de maîtrises d’œuvre (ou d’entreprises) aurait choisis. Par conséquent, il est utile de séparer dans la convention ces deux types d’usages : la maîtrise d’ouvrage signera uniquement la partie qui concerne ses objectifs.

A chaque usage, va correspondre des demandes de livrables BIM avec des jalons de livraisons.

Un livrable BIM est obligatoirement issu d'une seule source d'information : la maquette BIM.

Cette maquette devra être décrite à travers un Tableau de Niveaux de Développement des objets (TND). Par ailleurs, un livrable BIM peut avoir différentes formes : une maquette BIM en soi (au format natif ou format IFC) une représentation commerciale 3D, des plans ou coupes 2D, ou encore, de l’information mise sous la forme de tableaux… Actuellement, dans un projet BIM, tous les livrables ne peuvent être issus d’une maquette ; néanmoins, cela viendra sûrement avec le temps. Ainsi, nous devons lister l’ensemble des livrables à fournir, avec leurs jalons de livraison. Enfin, il est à noter que nous devons associer la publication d’un livrable, à une mise à jour de la base de données dans la plateforme collaborative.

Un jalon de livraison correspond à la fin d'un processus.

Les phases du projet, décrites dans la loi MOP (Esquisse, APS, APD, PRO…), déterminent généralement les jalons principaux. Cependant, il existe très souvent des jalons intermédiaires au sein de ces phases.

Certains objectifs BIM peuvent être liés à un seul usage, qui est décrit par un processus BIM spécifique. Tandis que d’autres objectifs nécessitent plusieurs usages avec des processus se déroulant en parallèle ou successivement. Différentes listes d’usages sont à votre disposition, par exemple la liste de buildingsmart-France, ou celle du cadre de référence : « BIM for value » de la Smart Buildings Alliance. 

Prenons un exemple : nous allons choisir comme objectif : « faciliter la synthèse technique et architecturale, à travers une meilleure coordination des études d’exécution et la détection des conflits » (très utile pour tout chantier de construction). Avec cet exemple, nous utilisons le cadre de référence de B4V. L’usage qui nous intéresse principalement est : LA GESTION DES CONFLITS (10B). Cependant, selon B4V, cet usage en implique d’autres en amont :

Une fois le périmètre d’application de la convention défini (usages mis en correspondance avec les phases du projet), nous devons construire des processus BIM dont le but premier est de répondre aux exigences d’échange d’informations de la MOA : « EIR » selon la norme ISO 19650. Enfin, toujours selon cette norme :  l’ensemble des EIR permettra de répondre aux requêtes d’informations du projet (PIR). Dans la grande majorité des cas, le maître d’ouvrage voudra obtenir un DOE numérique à la fin du chantier.

Nous établissons des règles pour le building information modeling.

Le BIM Manager s'assurera que chaque modèle respecte bien le système de géoréférencement choisi. Ainsi, la concaténation des modèles se fera beaucoup plus aisément.

⚠️ La priorité est de respecter le Tableau de Niveaux de Développement (TND) de la convention. Ce TND respectera obligatoirement celui du cahier des charges rédigé par l’AMO BIM. Toutefois, il existe parfois des cahiers des charges sans TND (dans ce cas, il faudra absolument le créer). 

nous explicitons chaque "cas d'usage BIM".

Définition d'un cas usage BIM :

Un cas d’usage BIM est un processus amenant à l’exécution d’un usage. Autrement dit, un cas d’usage précise le : Où ? Quand ? Qui ? Quoi ? Et surtout, qui répond à la question : « Comment allons-nous obtenir les livrables exigés résultant du choix d’un usage ? » 

L’idée de processus métier précis, mis en parallèle avec des demandes d’informations claires, est au centre de l’élaboration d’un cas d’usage BIM !

Tout d'abord, le BIM Manager peut établir : "Un arbre d'enchainement des cas d'usages".

Cet arbre d’enchainement prend la forme d’un schéma (type BPMN) donnant une vue d’ensemble du protocole. Ainsi, ce schéma explique visuellement comment les différents processus se coordonnent, afin de « cocher » nos objectifs et rendre les livrables requis ; celui-ci est surtout utile dans le cas de projet BIM complexe.

Ci-dessous, un exemple que nous donne l’université de Pennsylvanie (USA), une référence dans la transition numérique appliquée au secteur du bâtiment :

arbre d'enchainement des usages BIM

Ensuite, nous cartographions de façon plus détaillée tous les cas d'usage.

Lorsque nous décrivons nos cas d’usage, nous partons d’une vue d’ensemble, pour ensuite décrire de plus en plus précisément, des processus et sous-processus. Ainsi, nous pourrions parler d’une logique : « d’entonnoir » lors de l’élaboration d’un protocole BIM.

Finalement, la description d'un cas d'usage BIM devra expliciter :

En vue de "cartographier" les cas d'usage, nous utilisons des schémas BPMN.

BPMN est l’acronyme de : « Business Process Model and Notation » . C’est une méthode normée visant à modéliser des processus (ISO/CEI 19510). Ainsi, un schéma BPMN décrit un processus dans un cadre appelé « bassin » (pour faire référence à un bassin de piscine olympique). De plus, des « lignes d’eau » subdivisent ensuite ce bassin-cadre.

Voici un second schéma BPMN, celui-ci montre un exemple de processus de vérification lors d’une mission de BIM Management. Dans ce cas, la maquette BIM fédérée résulte de la fédération de 3 maquettes numériques « métier » : Architecture, Structure et MEP. De plus, le BIM Manager aura la charge de la vérification de la maquette fédérée, mais aussi de chaque modèle métier !

exemple de schéma BPMN dans une convention BIM

Nous choisissons un environnement de données commun (EDC/plateforme BIM).

Le Building Information Management s’inscrit dans une méthode de travail hautement collaborative. C’est pourquoi la circulation des informations doit être balisée, mais fluide. Par conséquent, les simples échanges de mails ne peuvent suffire. Dans un projet BIM, les acteurs du BTP doivent donc revoir les procédures et outils de communication qu’ils utilisent classiquement. 

Ainsi, nous recourons au concept de CDE, en vue de faciliter le Building Information Management.

CDE est l’acronyme de « Common Data Environment ».

Un CDE permet la traçabilité des échanges de données et donc retrouver par la suite : « qui a fait quoi ? » Nous insistons sur ce point, car celui-ci répond totalement aux problèmes de responsabilités et propriété intellectuelle. En effet, dans un contexte d’étroite collaboration, ces sujets inquiètent les contributeurs de la maquette. La mise en place du CDE doit se décider en discutant avec les coordinateurs BIM. En outre, les habitudes de travail des BIM modeleurs doivent être prises en compte. La première partie de la norme ISO 19650 explique le concept de CDE. C’est le BIM Manager qui administre celui-ci. Enfin, il faut être particulièrement attentif aux conséquences de l’éventuel passage d’un CDE à un autre. C’est pourquoi nous devons prévoir, autant que faire se peut, les conditions d’un futur changement de plateforme BIM.

Chaque contributeur de la maquette est responsable de la sauvegarde de ses données, et ce, malgré la présence d’un CDE !

Nous établissons les conditions d'utilisation du CDE.

⚠️  Pour des questions de traçabilité, chacun s’engage à échanger les conteneurs d’informations uniquement par l’intermédiaire du CDE !

le BIM Manager et les coordinateurs BIM élaborent "une stratégie de fédération" pour la maquette.

La maquette, est en fait, le résultat de la fédération de plusieurs modèles BIM. Ainsi, ces modèles sont définis en fonction d’une ou plusieurs disciplines : structure, CVC, plomberie, électricité, lots architecturaux… En outre, pour un grand bâtiment, il est également nécessaire de scinder la maquette selon des zones définies. La façon dont nous scindons la maquette BIM se nomme : « stratégie de fédération » selon la norme ISO 19650. La convention BIM doit absolument expliquer cette stratégie !

Une matrice de responsabilité "fine" est jointe au TND de la convention BIM.

Pour tout accord contractuel, au sein d’un groupement de maîtrise d’œuvre ou d’entreprises, il est nécessaire de définir les limites de chaque prestation et donc de responsabilités des acteurs. Ainsi, la convention BIM ne fait pas exception. Nous devrons dans un premier temps définir les personnes morales responsables de chaque modèle. Néanmoins, par la suite, il sera utile d’établir non seulement l’auteur de chaque objet paramétrique, mais aussi de chaque donnée alphanumérique qui l’accompagne. C’est pourquoi nous adjoindrons une colonne « MEA » au Tableau de Niveaux de Développement. MEA est l’acronyme de Model Element Author.

Nous convenons d'un planning pour les principales réunions de la cellule BIM.

Ces réunions ont lieu, généralement, entre le BIM Manager et les coordinateurs BIM.

Il existe deux réunions, à minima, en vue d'établir la convention :

Après signature, et donc contractualisation du document :

Des protocoles de vérification de la maquette et des livrables qui en découlent sont mis en place.

Nous devons clairement définir les limites de prestations : entre le BIM Manager et chaque coordinateur BIM. Est-ce au BIM Manager de vérifier chaque modèle ? Ou bien, est-ce de la responsabilité de chaque coordinateur BIM ? Dans ce dernier cas, le BIM Manager aura ensuite, la charge de vérifier la bonne concaténation des modèles et leurs interfaces. Évidemment, la rémunération de chacun dépendra de ces réponses !

Pour la constatation des non-conformités, nous nommerons une visionneuse IFC de référence. Par ailleurs, celle-ci est obligatoirement reprise du cahier des charges (quand celui-ci la nomme).